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Burkina Faso : Une vieille connaissance du président Kaboré prend la tête des services de renseignement

Le suspense aura duré jusqu’au bout. Le matin même de la nomination, la très informée « Lettre du Continent » annonçait que l’influent colonel Auguste-Denise Barry était pressenti pour devenir le nouveau patron des services de renseignement burkinabè.

Raté. C’est une personnalité plus discrète qui a été choisie : le colonel François Ouedraogo. Un officier de gendarmerie méconnu du grand public.

Avec le colonel François Ouedraogo, Roch Marc Christian Kaboré, qui a nommé lui-même en Conseil des ministres le nouveau patron des renseignements, choisi une vieille connaissance puisqu’il a été pendant 10 ans son aide de camp, à l’époque où il était président de l’Assemblée nationale. Informaticien, le colonel Ouedraogo a dirigé l’Agence nationale de la sécurité des services informatiques (ANSSI).

Il y a un an, il avait lancé le projet de plateforme baptisé Irapol (Identification, Rapprochement, Analyse de Police, Outil informationnel global). Un outil informatique de partage d’informations pour permettre aux différents acteurs de la sécurité de travailler ensemble et plus vite.

Il aura fallu des mois pour aboutir à cette nomination. Le 14 octobre 2015, après un putsch manqué et des attaques terroristes aux frontières, le compte rendu du Conseil des ministres annonçait un décret portant création d’une nouvelle « Agence nationale de renseignement », pour « une meilleure prise en charge des questions de défense et de sécurité dans notre pays ». Une recommandation de la Commission de réconciliation nationale et des réformes (CRNR).

Mais c’est cinq mois et une élection présidentielle plus tard que, dans un nouveau compte-rendu, un nouveau décret a abrogé le précédent et porté effectivement « création de l’Agence nationale de renseignements (ANR) », pour « mettre en place une structure centrale en matière de renseignements au Burkina Faso et de la doter des moyens lui permettant de remplir efficacement ses missions ». Une semaine plus tard, le 9 mars, le colonel François Ouedraogo a été nommé.

Pourtant, cette agence était très attendue. Le général Gilbert Diendéré, considéré comme l’un des meilleurs connaisseurs des groupes terroristes de la région, étant détenu, le pays se trouvait démuni face à cette menace. Un besoin rendu d’autant plus pressant par les attaques terroristes du 15 janvier.

Il s’agit d’un poste « délicat et stratégique », confie une source de la société civile bien informée. Or, « les nouvelles autorités ne savent pas à qui se fier au sein de l’armée. Elles hésitent », estime-t-elle. Si le putsch du général Diendéré a échoué en septembre 2015, le président Roch March Christian Kaboré est engagé dans une périlleuse réforme de l’armée. Depuis l’indépendance, le pays a connu de nombreux coups d’Etat et l’armée a été très politisée.

Le colonel Auguste-Denise Barry était-il trop clivant ? Son nom était abondamment cité ces derniers mois dans la presse. Cet ancien du Régiment de sécurité présidentielle (RSP), considéré comme l’éminence grise de l’ex-Premier ministre Isaac Zida s’était attelé, pendant la transition politique, à restructurer les services d’écoute et de renseignement burkinabè. Des services jusque-là écrasés par le tout puissant RSP, lui-même sous la coupe du président Compaoré. Ministre de l’administration territoriale, de la décentralisation et de la sécurité, il avait été victime en juillet 2015 des pressions du RSP et avait dû quitter le gouvernement.

Avant la nomination du colonel François Ouedraogo, Le Courrier Confidentiel, un bimensuel burkinabè, affirmait que le colonel était « pressenti pour être le patron de l’Agence nationale de renseignements. Son nom a même été proposé lors de réunions restreintes des têtes pensantes du système de sécurité nationale. Mais dans le premier cercle du président Kaboré, certains conseillers veulent pas le voir émerger ». Une source diplomatique s’étonne que le colonel Barry ait pu être considéré par les autorités ou la presse comme un candidat sérieux à la tête des renseignements : trop retors, trop ambitieux et difficilement contrôlable.