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Séga Diarrah : «Une révision féconde du rapport franco-africain est indispensable aujourd’hui »

Diplômé de l’Ecole Polytechnique Fédérale de Lausanne (Suisse) en systèmes d’information et de l’Institut d’Etudes Politiques (Sciences Po) de Paris (France) en politiques publiques, et également président du Collectif « Bi-Ton », Séga Diarrah revient sur les enjeux du 27e sommet Afrique-France qui prend fin aujourd’hui à Bamako, auquel ont pris part près d’une quarantaine chefs d’Etat et de gouvernement africains, le président français et sa délégation.

Sahelien.com : Aujourd’hui, s’achève le sommet Afrique-France qui était tant attendu à Bamako. Quels enseignements peut-on en tirer?

Ce qu’on peut retenir globalement du sommet Afrique France de Bamako 2017, au-delà des enjeux politiques, est la réussite de l’organisation malgré une situation sécuritaire assez difficile. De manière générale, l’organisation du sommet a été un succès. Si les Maliens décident de se mettre au travail, ils peuvent relever n’importe quel défi.

Sahelien.com : Que peut apporter ce sommet au Mali et à l’Afrique?

Séga Diarrah : La présence d’une cinquantaine de chef d’Etat et de gouvernement sur notre territoire permettra à coup sûr au Mali d’être au-devant de la scène internationale. Une occasion pour notre diplomatie de renouer avec le leadership en Afrique et de faire oublier les différents scandales financiers et l’insécurité grandissante dans le centre et le nord du Mali. Le sommet pourrait également être une aubaine pour le secteur privé Malien afin de trouver un levier de croissance à travers des partenariats grâce à la présence d’hommes d’affaires Français et Africains.

Sahelien.com : Mais, concrètement, à quoi servent les sommets Afrique-France?

Séga Diarrah : Contrairement à ce que beaucoup de nos compatriotes pensent, le sommet Afrique France a été initié par les présidents Hamani Diori du Niger et Léopold Sédar Senghor du Sénégal, comme une sorte de « Commonwealth à la française ». Réservé au début uniquement aux anciennes colonies françaises, le nombre d’invités n’a cessé de croitre d’année en année. Le sommet Afrique France est une des structures de la coopération franco-africaine

Sahelien.com : Quelles sont les relations entre la France et l’Afrique aujourd’hui?

Séga Diarrah : Je constate que la politique africaine de la France demeure impavide. L’Afrique n’appartient pas aux Africains et c’est extrêmement préoccupant pour moi. Cet axiome se traduit encore à travers les comportements de nos élites. La France profite de l’Afrique. Les fonctionnaires du Trésor français et les dirigeants des entreprises françaises les plus performantes ne peuvent pas me contredire malgré l’instabilité croissante des économies subsahariennes, les menaces qu’elle fait peser sur les équilibres financiers et monétaires de la Zone franc, l’exiguïté et l’insolvabilité des marchés. « L’Afrique est le seul continent qui soit encore à la mesure de la France, à la portée de ses moyens. Le seul où elle peut, encore, avec ses hommes, changer le cours de l’histoire », déclarait emphatiquement Louis de Guiringaud, le ministre des Affaires étrangères de M. Giscard d’Estaing, en 1979.

Sahelien.com : Qu’est ce qui caractérise aujourd’hui les relations franco-maliennes ?

Séga Diarrah : La France est un partenaire privilégié du Mali. Ce partenariat a pris une nouvelle dimension à partir de 2013 grâce à l’opération Serval, l’accord de défense militaire…Cependant, je constante une grande divergence d’appréciation en matière de définition des priorités et des options entre le gouvernement Français, et les élites Maliennes. Ces divergences ne permettent pas de jeter un regard définitif sur la coopération entre ces deux entités. Alors que les premiers semblent préoccupés par l’évolution des flux macroéconomiques (aide publique au développement, taux d’endettement, question Touarègue etc.), le second, quant à lui, s’attache davantage aux dimensions pratiques et symboliques du contact entre les deux pays, qui rejaillissent directement sur son vécu quotidien (délivrance de visas, implantation de centres culturels, octroi de bourses, création des lycées, aide militaire direct, etc.).

Sahelien.com : A qui profite ce sommet Afrique-France?

Séga Diarrah : Le monde change, nos relations aussi doivent changer. Une révision féconde du rapport franco-africain est indispensable aujourd’hui. Les Pays Africains doivent faire une réappropriation partielle des visées, des contours et du rythme de cette coopération. Il est temps pour la France aussi de  » brader l’Empire ».