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Education au Niger : les défis restent nombreux

Dans l’après-midi du mardi 13 avril 2021, vingt enfants ont péri dans l’incendie de plusieurs salles de classe en paillote au quartier Pays-Bas à Niamey. Un drame qui relance la question de la gestion des écoles publiques et des infrastructures scolaires dans un pays où des milliers de hangars en paillote servent de salle aux élèves, faute de ressources suffisantes.

Dans le quartier Pays-Bas, situé à l’est de la capitale, les habitants toujours sous le choc. Chaque fois que Issa Ali évoque cet incendie, il n’arrive pas à retenir ses larmes. Ses deux filles ont péri dans ce drame. « L’une avait 4 ans et l’autre en avait 5. J’étais parti en courant à leur école, j’ai essayé de rentrer mais l’accès m’a été refusé. Au même moment, des amis sur place m’informent de la mort de vingt enfants, j’ai vite senti que mes enfants étaient parmi eux, puisqu’elles n’ont pas été retrouvées et n’étaient  pas non plus à l’hôpital », relate, la gorge nouée, ce parent d’élève.

Abdoulaye Moussa, lui, a perdu son fils de 6 ans. Il pointe du doigt, l’état des infrastructures scolaires. « Je souhaite que cette tragédie interpelle nos autorités et que ça soit la première et la dernière fois que nous vivons ce genre de drame. Concernant les classes en paillote dans une ville comme Niamey, la capitale de notre pays où les hangars, les salles en paillote servent de classe pour les élèves, c’est une honte. Et puis, si vous regardez comment sont construites ces classes sans aucun respect des normes à l’intérieur, les enfants sont entassés les uns contre les autres. En cas d’un problème de ce genre, les enfants vont se bousculer à la sortie. Tellement qu’ils sont en surnombre. »

Un problème récurrent

Ce drame au quartier Pays-Bas a coûté la vie à vingt enfants. En quelques semaines, plusieurs classes en paillote dans d’autres quartiers de la capitale sont parties en fumée mais sans faire de victimes. Un problème récurrent dans le pays malgré plusieurs alertes, selon Issoufou Arzika, Secrétaire général du Syndicat national des enseignants du Niger (SNEN). « Nous avions regretté de ne pas avoir été entendus lorsque nous criions que les conditions de travail surtout pour ce qui concerne les classes en paillote n’étaient pas favorables à un apprentissage de qualité. C’est un danger aussi, nous sommes dans un pays sahélien où il vente beaucoup, il y a la sécheresse. Nous avons la moitié de nos infrastructures qui sont en paillote. Plus de 30.000 classes sont en paillote », indique-t-il.

Et d’ajouter: « avec des entreprises très bien calées, je ne crois pas qu’on puisse, au bout d’un an ou de deux ans, construire plus de 30.000 classes éparpillées dans ce vaste Niger pour dire qu’on a fini avec les classes en paillote. C’est un processus. On devrait évoluer vers la fin des classes en paillote mais nous sommes en train d’aller vers le développement des classes en paillote. Il faut qu’on arrête. C’est l’Etat qui doit décider, chercher les financements. En ce qui concerne la mise en œuvre de ces politiques-là, tous les acteurs doivent être impliqués.»

Selon le Recensement général de la population et de l’habitat (RGPH-2012), plus de la moitié de la population (51,6 %), a moins de 15 ans. La gestion des flux scolaires entre le primaire et le secondaire devient difficile alors que les établissements scolaires n’ont pas assez les capacités d’absorber ces flux, comme à l’école primaire Koido I du quartier Talladjé.

Après un incendie qui a détruit dix classes, il y a quelques semaines, certaines classes sont surpeuplées et des enfants assis par terre. La directrice déplore les conditions d’études des élèves et de travail des enseignants. « Ici, on a 1345 élèves à Koido I, et ma voisine a 1023 élèves. L’appel que je lance, c’est de vite trouver une solution à cette situation. Soit on décongestionne, soit on construit de nouvelles classes, comme les parents ne veulent pas qu’on prenne leurs enfants pour les amener de l’autre côté. Déjà, il y a beaucoup d’élèves qui sont du quartier Pays-Bas. Les enseignants sont dans des conditions de travail très précaires. On peut avoir 200 et quelques élèves dans une seule classe », affirme Madame Habsatou Rabiou.

Des promesses

Devant les acteurs du système éducatif nigérien et les partenaires techniques et financiers, le 30 avril dernier, le nouveau président de la République, Mohamed Bazoum a détaillé le programme qu’il entend mettre en œuvre au cours de son quinquennat. Un programme basé sur quatre axes dont la poursuite de « la construction et la réhabilitation des infrastructures scolaires« . « L’idée est de disposer de modèles de construction de classes qui allient faiblesse de coûts et qualité de façon que nous en terminions avec les situations éprouvantes comme ces incendies qui sont provoqués sur les classes en paillote et qui ont débouché sur le drame du quartier Pays-Bas de Niamey« , a-t-il déclaré.

Pour faire face aux défis du secteur de l’éducation, les autorités promettent d’allouer 22% du budget contre 20% auparavant. Mais la question qui demeure est celle de la gestion des fonds. « Le Niger alloue, depuis 10 ans, près de 20% du budget global à l’éducation. C’est considérable, ça répond aux critères qui sont internationalement reconnus notamment les directives de la sous-région et pour l’instant, le président de la République a promis et a réitéré devant les partenaires sociaux et les partenaires au développement que cette enveloppe sera rehaussée à 22% du budget. Donc le financement du budget a une hauteur considérable, il faut maintenant chercher l’efficience. Quels sont les résultats auxquels nous aboutissons à partir de ce financement qui est considérable. C’est ça la problématique », souligne Mohamed Zeidane, Secrétaire général du ministère des enseignements secondaires.

Depuis quelques années, l’insécurité règne dans plusieurs régions du Niger provoquant la fermeture des centaines d’écoles. Le département de l’éducation annonce la mise en place de stratégies de regroupement des élèves des zones affectées. « Concernant la sécurité, on a près de 400 écoles fermées pour lesquelles nous avons une stratégie. Dans les centres de regroupement au niveau des villages où des communes qui sont sécurisées, on reçoit ces élèves-là. Maintenant, c’est de faire en sorte qu’il y ait un cadre adéquat pour accueillir ces enfants-là, notamment les faire accompagner par des internats pour les filles qui décrochent beaucoup plus que les garçons, parce que les questions de sécurité font qu’elles quittent l’école. Elles sont souvent tentées par le mariage précoce, par un certain nombre de pesanteurs socio-culturelles. Il y a toute une stratégie de regroupement de ces élèves, d’affectation des enseignants, d’accompagnement sur le plan alimentaire, le plan social. Nous avons une stratégie de rééducation en situation d’urgence et c’est ce que nous déployons avec l’appui de nos partenaires », ajoute M. Zeidane.

Omar Hama Saley, Hawa A. Coulibaly (Stg.), Mody Kamissoko

*Réalisé avec le soutien du Programme Sahel de l’IMS, financé par DANIDA.

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