Depuis 7 ans, il parcourt seul, des dizaines de kilomètres en moto pour soigner les populations éloignées des centres de santé, dans les régions de Ségou, Mopti et Tombouctou.
Avec son engin et son sac à dos contenant quelques appareils comme un tensiomètre, un glucomètre, des tests de détection rapide (TDR), et des médicaments, Mahachi Ag Alkalifa est très sollicité là où il passe. « J’opère dans plusieurs zones jusqu’à Feyadji, dans la commune de Kareri. A Doungara dans la commune de Toguere Coumbé. A Tamaro et Sormo, dans la commune de Gathie Loumou. A Toulebellé et Mola dans la commune de Léré et jusqu’à Droussaya dans la commune de Nampala. Les centres de santé les plus proches sont le CSCom de Dioura dans la région de Mopti qui est à 50 km d’ici et celui de Léré dans la région de Tombouctou à 85 km » indique l’infirmier.
Pendant la saison des pluies, le déplacement devient pénible à cause du mauvais état des pistes. Mais c’est la période propice à certaines pathologies comme le paludisme. Faute de moyen de transport adéquat, ce sont les charrettes qui servent à évacuer les malades.
C’est le cas d’une fillette transportée par charrette par son père depuis leur village, situé à 7 kilomètres à l’ouest de Kita, pour se faire soigner. L’infirmier les a rencontrés au cours d’une de ses missions. Les soins seront finalement administrés à l’enfant sous un arbre.
« Le paludisme est une maladie très fréquente ici, surtout pendant la saison pluvieuse. Il tue les populations notamment les enfants quand ils ne reçoivent pas le traitement aussitôt. Dans cette zone où les populations sont nomades, les malades peuvent durer plus de trois jours sans avoir accès au traitement, ce qui peut aggraver la maladie surtout chez l’enfant ou même causer la mort. Quand le malade est vite amené au centre de santé, il peut guérir vite », explique l’infirmier.
Manque d’agents de santé
Il déplore, cependant, l’absence de personnel soignant dans la zone. « Je suis le seul agent de santé présent sur le terrain », souligne-t-il. Avec ses propres moyens, Mahachi Ag Alkalifa arrive à sillonner plusieurs hameaux pour sauver des vies. « Les médicaments avec lesquels je travaille m’appartiennent. Je n’ai aucun lien avec l’Etat ni avec les ONG. J’importe les médicaments de Bassikounou en Mauritanie. Quand je suis beaucoup occupé pendant le pic de paludisme par exemple, je trouve quelqu’un pour me les amener de Bassikounou ou Fassala. Mais à Fassala, les produits sont beaucoup chers. Quand je trouve l’occasion, je prends ma moto pour me rendre personnellement à Bassikounou pour les acheter », détaille-t-il.
Concernant les frais de consultations, Mahachi explique qu’il y a des patients qui le payent sur place. Mais «ceux qui n’ont pas des moyens, je les soigne, et quand ils trouvent, ils me payent. Il y a aussi des éleveurs qui n’ont souvent rien, ils ne payent qu’après avoir vendu leur bétail pendant la période qui suit l’hivernage. »
Mahachi est basé à Kita, un village de la commune de Kareri dans le cercle de Ténénkou. Le centre de santé dans lequel il travaillait avait été détruit lorsque les populations se sont réfugiées en 2012 en Mauritanie. «Depuis le retour de la population, on n’a pas trouvé d’appui pour sa réhabilitation. Il y a certaines ONG qui viennent parfois visiter le lieu et nous promettent par la suite de le reconstruire dans un délai d’un mois, mais on ne les revoit plus », affirme-t-il.
Entre insécurité, intempéries et manque de moyens, Mahachi Ag Alkalifa ne compte pas abandonner les populations. Mais il espère avoir plus de matériels et des agents de santé pour réussir leur mission, celle de sauver des vies.
Walid Ag Minani, Augustin K. Fodou, Mody Kamissoko
*Réalisé avec le soutien du Programme Sahel de l’IMS, financé par DANIDA.
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