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Mali : Quel est l’impact de l’exploitation minière de l’or sur l’économie?

Le Mali est troisième pays producteur d’or sur le continent africain depuis plusieurs années, derrière l’Afrique du Sud et le Ghana.

Il est onzième au plan mondial et compte actuellement dix sites de production et de pratique de l’orpaillage traditionnel, répartis entre les régions de Kayes et de Sikasso.

La production annuelle moyenne est de 50 tonnes et les réserves sont de 658 tonnes, selon la Direction nationale de la géologie et des mines (DNGM).

L’Etat est actionnaire à 20% dans sept des huit sociétés en production

Huit exploitations minières sont cogérées par l’Etat malien et six autres sociétés minières de diverses nationalités et de renommée internationale. Ce sont AngloGold Ashanti (Afrique du Sud), IAMgold (Canada), Randgold Ressources (Afrique du sud), Endeavour Mining (Canada), Resolute Mining (Australie) et Avnel Gold Mining Ltd (Grande Bretagne).

L’Etat malien est actionnaire à 20 % dans chacune des huit exploitations minières, sauf SEMOS-SA à Sadiola, où il ne détient que 18 %.

Un ancien conseiller technique au ministère des Mines, qui a requis l’anonymat explique : « à l’ouverture de la SEMOS-SA, il nous fallait de l’argent pour certaines opérations. La Banque mondiale nous a soutenus contre 6% des actions pendant quatre ans. Et, quand la Banque s’est retirée, on a vainement essayé de convaincre l’Etat à reprendre les 6 % ou les 2 %. Mais les moyens financiers manquaient et l’Etat ne pouvait pas se permettre de nouvelles dettes ».

Et sur les 20 % que détient l’Etat, notre interlocuteur assure que « c’est dans le cadre des ajustements structurels que cela est fait et c’est aussi dans le Code minier. L’Etat ne peut pas dépasser ce pourcentage ».

Ces sociétés ont réalisé une production de 51,007 tonnes en 2013, 50 tonnes en 2014 et 51, 020 tonnes en 2015.

« Sans le secteur minier, l’Etat malien se serait accroupi sous les fardeaux des dépenses », reconnaît Souleymane Sidibé, ancien député de la zone minière de Syama.

L’apport de l’ensemble du secteur minier au produit intérieur brut (orpaillage avec 15 % et les carrières de sable et de gravier avec 5 %) était estimé à 5,8 % en 2014, soit 345 milliards F CFA.

La contribution de l’or au PIB avait atteint 8 % en 2012, l’équivalent de 415,23 milliards F CFA à la faveur de l’augmentation du cours de l’once sur le marché international.

Selon la Chambre des Mines, l’or extrait du territoire malien représente également 70% des exportations totales du pays.

« De quoi maintenir la balance commerciale du pays dans le positif », complète, l’économiste Ismaël Keita.

Et d’ajouter : « En 2012, les exportations du pays étaient estimées à 1 473 milliards F CFA. Sur ce montant, les exportations de l’or étaient chiffrées à 1 028,1 milliards F CFA ».

Selon les estimations de la BCEAO, les exportations minières ont apporté plus de 73 milliards F CFA en 2011 ; 69,8 en 2012 aux caisses de l’Etat.

Un taux qui a, sans doute, régressé, mais qui montre également à quel point le secteur minier, en particulier l’or, constitue un véritable ballon d’oxygène pour l’économie du Mali.

Des taxes et impôts à l’Etat

En plus des dividendes tirés de sa part de 20 % dans la plupart des sociétés minières, l’Etat perçoit 30 % sur les bénéfices bruts de la vente de l’or.

Les caisses de l’Etat sont aussi approvisionnées par les taxes et les impôts que les compagnies minières paient à travers les Douanes, les Domaines, les investissements directs et même le budget en passant naturellement par les recettes fiscales.

Ainsi, en tant que principaux investisseurs étrangers dans le pays, les sociétés ont investi près de 51 milliards FCFA sur 56 milliards qui étaient programmés en 2009 (soit un taux de réalisation de 90,2 %) contre près de 230 milliards F CFA en 2012 sur près de 258 milliards F CFA programmés, l’équivalent d’un taux de réalisation de 89,1 %. Cela, à cause notamment de la crise multidimensionnelle qui sévissait au Mali.

En 2010, elles avaient investi près de 112 milliards F CFA sur près de 76 milliards prévus (145,7 % de taux de réalisation).

Pareil pour 2011 où elles ont pu investir directement 209 212 millions F CFA sur les 200 225 millions qui étaient programmés pour un taux de réalisation de 104,5%.

Toutes ces données ont été fournies par les sociétés d’exploitation dans l’annuaire 2012 de la Cellule de planification et des statistiques (CPS).

Par ailleurs, à la Direction générale des impôts (DGI), les recettes provenant des huit sociétés d’exploitation aurifères (sans Wassoul’or et Kofi) s’élèvent à plus de 164 milliards F CFA durant l’année 2012, dont moins de 60 milliards F CFA ne viennent pas des lingots d’or.

Selon la DGI, cette contribution correspond à 35% de l’ensemble des recettes recouvertes par les services des impôts qui était de 470 milliards F CFA.

Du côté des Douanes, le secteur minier a apporté plus de 55 milliards F CFA en 2012 dont seulement une trentaine qui ne provient pas de l’or. Le reste constitue le seul apport des lingots dorés.
Ce montant est de peu inférieur à celui perçu par les services du Domaine et des Cadastres.

Selon la Direction nationale des Domaines et des cadastres (DNDC), plus de 63 milliards FCFA ont été investis par les mines pendant cette même période, dont un peu plus de 80 millions pour les autres minerais et 33 milliards pour les dividendes.

Quant au budget de l’Etat, les mines y ont contribué, selon la CPS, à hauteur de plus de 284 milliards F CFA en 2012. Ce chiffre n’a cessé d’augmenter depuis 2008 passant à plus de 300 milliards en 2014.

Le secteur minier est très vital pour l’économie nationale. Seulement, les autorités ne disposent pas de moyens efficaces de contrôle de la production annuelle de ces multinationales.

Où va la patente versée par les sociétés minières aux communes, cercles et régions dans lesquelles elles opèrent ?

Dans le cadre de leur stratégie de développement local, les sociétés minières paient chaque année une patente c’est-à-dire une taxe qu’elles versent aux collectivités concernées.

Estimée à des milliards par an en fonction des sociétés, cette patente est censée contribuer à l’amélioration des conditions de vie des populations riveraines des mines.

Selon le ministère des Mines, elle est répartie à raison de 60% à la commune où opère la société, 25 % au cercle et 15 % à la région.

Il est difficile de vérifier si cette patente est effectivement ou partiellement versée aux collectivités concernées car elle est d’abord versée dans les comptes du Trésor public.

Il est aussi évident que cette manne financière n’est pas consacrée comme cela se doit au développement local. La pauvreté et les conditions de vie difficiles dans les zones minières, comme Morila, Yatela, Syama l’attestent.

Selon certains spécialistes des mines, la traçabilité de ces fonds est à voir du côté de certains élus locaux ou des cadres du ministère des Mines.