« Je viens de la grande cour devant laquelle, il y a la photo de la femme qui dit ‘’silence’’ par l’index».
C’est la cour de Bolé, centre de détention pour femmes que Salimata (nom d’emprunt) décrit ainsi. Pour une enfant de 6 ans on peut comprendre la façon littérale par laquelle, elle indique ce qui était sa ‘’maison’’. Teint clair, un peu mince, les cheveux tressés en natte, Salimata est une mignonne petite fille pleine de vie.
Elle n’avait pas choisi d’être en prison. Pourtant elle y a vécu trois bonnes années. « J’étais dans la cour (c’est comme ça qu’elle appelle la prison) avec ma maman Fatoumata », dit-elle de sa petite voix, frottant ses yeux tout rouges.
La mère de Salimata était condamnée et déférée à Bolé en mars 2014. A l’époque, sa fillette n’avait que trois ans. N’ayant personne à qui la confier, Fatoumta l’amène avec elle en prison. Elles vont purger la peine de la mère ensemble.
Pendant un an, la petite Salimata n’a pas mis pied hors de la ‘’cour’’. Avec d’autres enfants dans la même situation, elle a tissé des liens d’amitié et essayait d’être un enfant normal. « Je jouais avec Hawa, la fille de Mah (une autre détenue)», se rappelle-t-elle nostalgique. Oui, son amie Hawa lui manque à entendre l’émotion dans sa petite voix quand Salimata parle d’elle.
Un autre de ses souvenirs de petite fille est la nourriture qu’on leur servait dans la ‘’cour’’. « Là-bas, on mangeait du riz et de la pâte en rotation les journées et chaque soir c’est du haricot qu’on mangeait ».
A quatre ans, le centre d’accueil des enfants de mères en lieu pénitentiaire, Mandela, a accueilli la fillette pour l’inscrire dans son jardin d’enfants. C’est une élève brillante que décrit sa monitrice : « Sali est courage et aime apprendre. Même quand on la ramenait à Bolé le soir, elle continuait de s’exercer seule ».
En fait, Salimata ne passait que la journée au centre. A sa descente d’école, elle est accompagnée à la prison pour femmes, pour passer la nuit avec sa mère dont la cellule se ferme à 18h. Fille et mère restent dans la cellule jusqu’au lendemain. « Je dors avec ma maman sur le même lit,» marmonne-t-elle entre timidité et tristesse.
Depuis la rentrée scolaire de cette année, Sali est inscrite en 1ère année fondamentale. Elle continuait à retourner dormir avec sa mère à Bolé, jusqu’à ce que cette dernière soit libérée, il y a dix jours. Par manque de moyens et par soucis de garantir une bonne éducation à sa fille, Fatoumata a choisi de la laisser au centre. D’ailleurs, la fillette s’y plaît bien. « Ma maman me manque, mais je veux rester ici », conclut-t-elle avant de courir prendre son ardoise pour faire ses calculs.
Combien d’enfants purgent aujourd’hui les peines avec leurs mères en milieu pénitentiaire au Mali ? Nous n’avons pas pu obtenir de statistiques au niveau de l’administration de Bolé. Mais selon les chiffres du centre qui accueille certains enfants, il y a présentement, plus d’une dizaine dont la majorité est sous allaitement maternel.