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Coup d’Etat militaire: le cauchemar des dirigeants maliens

Le phénomène du coup d’État constitue un véritable casse-tête pour le Mali. Ce beau pays en compte au total quatre à son actif à l’heure actuelle.

Le coup d’État, se définissant comme la prise d’un pouvoir dans un État par une minorité grâce à des moyens non constitutionnels, imposé par surprise et utilisant la force n’est pas nouveau au Mali. Il se manifeste soit par les militaires, soit par la société civile.

Depuis 1960 à nos jours, le Mali vient de connaitre son quatrième coup d’État militaire, ce qui est énorme dans un État supposé être de droit. En effet, c’est dans la nuit du mardi 18 août 2020, que l’ex-président Ibrahim Boubacar KEITA a décidé sous la contrainte des mutins, de quitter toutes ses fonctions pour la plus grande des surprises, tant il s’était montré ferme. Quelques heures après, les militaires ont fait un communiqué divulguant le nom de leur mouvement (Conseil National Pour le Salut du Peuple) et leur but (préserver la souveraineté du peuple). Pour une première fois, le coup d’État a été mené par des Hauts gradés de l’armée, avec en sa tête, le Colonel Assimi GOïTA, suivi du vice-président le Colonel Malick DIAW, ainsi que le porte-parole, le Colonel-major Ismaël WAGUE.

Si d’autres disent que c’est un coup d’État qui est considéré comme un crime exécrable et imprescriptible contre le peuple malien au vu de l’article 121 de la Constitution notamment la CEDEAO, la France et l’Union Européenne qui ont condamné avec force cet évènement au point de sanctionner le pays économiquement et financièrement (fermeture des frontières par les pays membres de la CEDEAO, suspension du financement des fonds pour la lutte contre la COVID-19 etc.) ; par contre d’autres aussi pensent, notamment la Russie, la Chine et le peuple malien, dans sa majorité que c’est une insurrection populaire qui s’est concrétisée par l’ingérence des militaires et qu’ils ne pouvaient point rester insensibles devant le cri légitime du peuple.

Dans ce cas d’espèce, peut – on parler de coup d’État sachant que c’est l’ex-président IBK qui a signé et déclaré sans dissentiment aucune sa propre démission ?

En tout cas, une chose demeure claire, entre le régime d’IBK et les Maliens, le divorce était consommé. Les grosses manifestations suscitées par le M5 sont, à ce propos, particulièrement illustratives.

L’occasion pour nous de revenir sur les autres putschs historiques inscrits dans les annales.

De 1960 au renversement du régime d’Amadou Toumani Touré en mars 2012

Commençant par Modibo KEITA qui fut le premier président du Mali lorsque ce pays proclama son indépendance, le 22 septembre 1960. Celle-ci fait suite à l’éclatement de l’éphémère Fédération du Mali, formée entre le Soudan français et le Sénégal. Il était un panafricaniste engagé et déterminé prônant le non-alignement à l’extérieur et un modèle de développement socialiste sur le plan domestique. Des réformes sont mises en place en agriculture ainsi que dans le commerce et le secteur manufacturier. Des problèmes économiques et financiers minent cependant le Mali.

Huit ans après l’indépendance du Mali, il est dépossédé par un coup d’État militaire le 19 novembre 1968 dirigé par le lieutenant Moussa TRAORE sans violence et le fait emprisonner.

Arrivé au pouvoir par un coup d’État, ce dernier perdra le pouvoir par le même moyen et arrestation pour corruption en 1991, vingt-trois ans plus tard. Durant son règne, il impose un parti unique, l’Union démocratique du peuple malien (UDPM), fortement contesté en raison de graves crises économiques. Un groupe militaire mené par le lieutenant-colonel Amadou Toumani TOURE renverse le général président qu’ils mettent aux arrêts le 26 mars 1991. Il sera jugé et condamné à mort en 1993. Un comité transitoire pour le salut du peuple est créé et l’UDPM dissoute. Un civil Soumana SACKO est nommé chef du gouvernement.

Dans la même année, le 26 avril, Alpha Oumar KONARE est devenu le président de la République et engage le Mali sur la voie de la démocratie et est réélu en 1997, pour un second mandat qui s’achève en 2002. Il sera aussi remplacé par Amadou Toumani TOURE. Cinq ans, plus tard, ce dernier sera réélu le 29 avril 2007 pour un second mandat qu’il n’aura absolument pas le temps de le terminer. Un putsch venu de Kati le fait fuir au Sénégal où il a vécu en exil pendant cinq ans avant de rentrer définitivement en 2017.

En dépit qu’on en ait, force est de reconnaître que la plupart des dirigeants maliens finissent de mauvais pied leur mandat.

In fine, en analysant la situation actuelle du Mali, nous constatons que rien n’est nouveau. A part Alpha Omar Konaré, tous les présidents passés ont subi ce cauchemar qui agonise de façon spontanée un pouvoir. C’est pourquoi malgré les crises et les sanctions, le Mali a l’expérience de ces genres de situation compte tenu des évènements précédemment cités dont le plus récent fut en 2012. A la différence des précédents évènements, cette fois – ci personne n’a plus droit à l’erreur (société civile, militaire, classe politique). L’heure est à l’autocritique, à l’introspection et au changement tout en commençant à mettre en place une transition consensuelle, légitime, crédible, performant et péremptoire pour la sortie de crise.

Abdramane TRAORE, Juriste et Gestionnaire / Oumar CISSE, Economiste