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Le débat sur la réforme de la constitution : de quoi je me mêle !

L’Assemblée nationale, en sa séance « nocturne » du 03 juin, a adopté un projet de loi modificative de la constitution du 25 février 1992. Je ne parlerai pas des incongruités juridiques qui entachent la forme procédurale suivie et annihilent définitivement le fond de la révision. La loi fondamentale est la norme supérieure à laquelle toutes les autres normes font référence et constitue l’acte fondateur d’une république. A ce titre, elle doit être suffisamment rigide pour résister à l’intrusion d’aventuriers politiques qui n’ont que seul repère : comment arriver au pouvoir ? Comment s’y maintenir ?

Les députés de la majorité ont adopté cette loi sans tenir compte de l’effet domino que cela pouvait avoir au sein de la population, qui croit encore que le Mali de demain peut être promoteur. L’empressement et la rapidité avec laquelle la loi a été adoptée à l’Assemblée nationale et renvoyée à la Cour constitutionnelle pour avis consultative obligatoire, et qui, comme à l’accoutumée, a dans un délai d’une rare rapidité (48 heures) donné son avis jonché d’approximation juridique, de pauvreté intellectuelle, d’inintelligence politique, de tâtonnement politique et de fausseté tant doctrinale que jurisprudentielle, amène les Maliens à croire à un complot.

Hélas la Cour, dans son avis avilissant n°2017-01/CCM/REF du 06 juin 2017 dit que les députés ont omis des pans entiers importants de la Constitution comme la formule de prestation du Président de la République pour ne citer celle-ci entre autres, et s’est permise d’ajouter ce qui a été oublié par le législateur. Ce faisant, elle a raté immanquablement le coche.

A ce sujet, Jean-Louis Debré, ancien président de l’Assemblée nationale française de 2002 à 2007 et ancien Président du Conseil constitutionnel français de 2007 à 2016 a dit : « Les membres de la Cour constitutionnelle ont la gomme, mais n’ont pas le crayon ». Il revenait donc à la Cour de renvoyer la loi à nouveau devant ceux qui ont « le crayon », c’est à dire les députés. La cour avait le choix de déclarer la loi soit inconstitutionnelle, ce qui aurait été plus digeste, ou faire des indications interprétatives aux députés allant dans tel ou tel sens. On attendait que la Cour se hissé à la hauteur de la Cour constitutionnelle du Niger qui a annulé le décret du 5 juin 2009 portant convocation du corps électoral pour le référendum sur la Constitution de la 6e république sous la houlette de la présidente de la Cour Madame Salifou Fatimata Bazèye. Mais en subrogeant au législateur, les membres de la Cour se sont rendus coupables d’une forfaitaire juridique d’une extrême gravité pour la jurisprudence. Malgré tout, le pouvoir a décidé de maintenir la date du 09 juillet. Là, en l’espèce, il y a manifestement une fausse solution juridique apportée à un vrai problème de droit.

Par ailleurs, ce qui est de l’opportunité juridique de cette révision, la centaine de conseillers du Président ne pouvaient ne pas savoir que généralement, dans l’histoire des révisions constitutionnelles, elles se font dans les moments que les constitutionalistes appellent « période de neutralité constitutionnelle », où le président sortant n’est pas candidat à sa propre succession. Mais ici en l’espèce, le doute est permis, j’allais dire légitime même. A qui profite cette révision ? La réponse à cette question nous aidera davantage pour le reste.

Enfin, je suis profondément préoccupé par le silence dolosif et coupable des hommes politiques que j’admire tant : Moussa Mara, Mountaga Tall etc. Si vous voulez être le Macron malien, sachez que Macron a dit non au Président Hollande en plein jour et a pris ses responsabilités devant l’histoire. De quoi avez-vous peur ?

A tous ces internautes épris de paix et de justice, ne vous découragez pas, restons mobilisés car la souveraineté appartient au Peuple qui aura le dernier mot le 09 juillet lors du vote protestataire. Si par extraordinaire, le coup de force passe, loin de nous, l’idée d’appeler au meurtre. Mais pour paraphraser Maximilien de Robespierre, depuis le 18eme siècle, si le gouvernement porte atteinte au droit sacré du peuple, le peuple a le sacré droit d’anéantir le Gouvernement !

Oumar SAMAKE

Consultant, Spécialiste des Droits de l’Homme.

barousamake@yahoo.fr

Les opinions exprimées ne reflètent pas nécessairement celles de Sahelien.com